Max Théon et la philosophie cosmique
Pascal Thémanlys

Le Mouvement Cosmique

Il nous semble que cette page profondément intellectuelle peut servir d'introduction à toute la littérature cosmique parue ensuite. En effet, Max Théon et son épouse commencèrent alors à publier une oeuvre immense et laissèrent aussi d'innombrables manuscrits.

Aux environs de 1900, ils se décidèrent à fonder le Mouvement Cosmique et la Revue Cosmique, consacrée à "L'Etude et à la restitution de la Tradition primitive".

Le Maître dit que le Mouvement cosmique fut fondé à la demande de Mme Théon et que c'est à elle qu'en revenait toute l'initiative : "Notre reine bien aimée passé sa vie à mettre l'intelligence dormante en activité comme les rayons solaires aident à germer toutes les forces latentes".

Dans l'œuvre écrite transmise par les initiateurs de la Philosophie Cosmique, on peut distinguer plusieurs catégories d'ouvrages : les uns qu'ils ne signèrent pas et qu'ils donnèrent comme provenant d'une source ancienne, orale ou manuscrite ; d'autre part des commentaires et légendes qu'ils s'attribuaient plus personnellement.

Ajoutons que la Revue Cosmique publia aussi de nombreux textes non signés et dus à la plume de collaborateurs occasionnels de valeur inégale.

A la première catégorie appartiennent les six volumes de la Tradition Cosmique se rapportant à la septième époque du Cosmos, les Vies d'Attanée Oannès, les Visions du Royal Néophyte, et, parmi les manuscrits, l'immense ouvrage qui se rapporte à la Sixième Epoque du Cosmos matériel, et un grand commentaire du Pentateuque.

La deuxième catégorie contient plusieurs commentaires des bases de la Philosophie Cosmique et des données de la Tradition, telles que l'Etude inédite de source ancienne, Un Pas en avant, etc..

Le commentaire inédit du Pentateuque a dû être rédigé en premier, puis les Livres de la Sixième Epoque, bien avant les ouvrages publiés.

C'est sous le nom d'Aïa Aziz que Max Théon dirigea la Revue Cosmique. Il faut se rappeler qu'il était alors à Tlemcen et avait une activité modeste, donnant quelques conseils, faisant, dit-on des guérisons parmi les habitants de la ville.

Nous pensons que le signe déposé comme marque d'authenticité des publications cosmiques représente l'universalité de la connaissance : L'étoile à six pointes de la sage chaldéenne contenant un lotus évocateur de l'Egypte et de l'Inde, peut symboliser aussi l'union des forces actives de l'homme et des forces passives de la femme.

Selon la Tradition Cosmique, tandis que florissaient ailleurs les civilisations des Druides, des Egyptiens et des Peaux-Rouges, quatre descendants de Chi : Vofhi en Chine, Brahma aux Indes, Bara au Nord et Oannès en Chaldée, revêtaient dans quatre langues différentes, voiles de la langue sacrée, la sagesse de l'Asie, provenant de Chi, fils de Scheth.

En essayant de retrouver à travers la tradition d'Oannès la science profonde du Béréchith, il est possible de remonter à l'époque antérieure, à Chi, et à la Sagesse primitive et universelle. D'autre part, la tradition d'Oannès importe particulièrement à l'Occident, étant donné son influence sur les doctrines hébraïque, mazdéenne, grecque et par conséquent chrétienne et islamique.

D'âge en âge, des fragments de la tradition orale furent écrits. C'est à ce phénomène qu'obéit la manifestation des ouvrages cosmiques. Les textes cosmiques affirment que quatre hommes sur terre portent toujours la pure tradition, et qu'ils se rencontrent parfois pour comparer leurs dépôts.

Le but réel d'une révélation nouvelle d'un fragment de tradition orale est le redressement des erreurs contenus dans l'interprétation des traditions écrites. Ainsi le réveil des plus hautes traditions, brahmanique, hébraïque ou chinoise, peut-il être un des aspects de la restitution terrestre.

Grâce à Mme Théon, toute la science de l'occulte qu'avait accumulée le Maître put entrer en action. Les phénomènes les plus remarquables de voyance, de prévision, d'inspiration ou de médiumnité devinrent leurs réalisations quotidiennes.

La lucidité et l'égalité d'âme dont faisait preuve Mme Théon suscitait l'admiration des rares privilégiés qui eurent l'honneur de l'approcher. Son labeur acharné et son action en tout degré font d'elle une personnalité féminine incomparable comme l'Histoire n'en connaît peut-être pas d'exemple.

On raconte que les plus sévères prophéties contre l'Idumée furent écrites par le Prophète Ovadia, qui était selon une tradition, d'origine iduméenne.

Mme Théon, née dans les brumes du Nord, et qui aimait les qualités psychiques des enfants sensitifs de l'Irlande, avait souffert dès son enfance de la manière dont les croyances, les codes et les coutumes restreignaient les possibilités de l'amour, de l'intelligence et de la vie. Lorsqu'elle put approfondir la Tradition authentique, l'image que les sectes et la politique en avaient tracée lui parut inadmissible. Etant donné que les cercles initiatiques d'où était sorti Max Théon considèrent toujours avec indifférence ou sympathie les doctrines qui déforment plus ou moins leurs enseignements, il est probable qu'il faut attribuer à la calme et douce pensée de Mme Théon certains aspects combatifs, railleurs et véhéments de l'exégèse cosmique. Celle qui était toute compassion envers les individus ne ménageait pas les fausses croyances, appliquant cette belle définition de la tolérance : le respect des personnes dans la lutte des idées.

Le but de l'initiation hiérarchique à travers les âges est "la suprématie et l'infinitude de la Cause sans cause et la restitution de la terre à l'homme, dont elle est, par ordre divin, l'héritage et le foyer. La Philosophie Cosmique se propose de démonter à l'homme psycho-intellectuel quels sont l'objet et le but véritable de la vie, et jusqu'à quel point les capacités humaines peuvent être développées, de rappeler à l'homme psycho-intellectuel qu'il est d'origine divine, qu'il porte en soi la divinité, et qu'il a mission de la manifester."

Elle souhaite aussi contribuer à : "tirer l'homme collectif non évolué de l'état grossier dans lequel il végète et travailler à restituer la tradition primitive, afin d'unir la science et la théologie sur une basse intellectuelle".

Car un vrai intellectuel qui n'a pas la chance de rencontrer l'initiation, risque normalement de devenir épicurien, disait le Maître.

Max Théon sympathisait avec tout mouvement d'émancipation humaine, nationale ou sociale, et son cœur battait pour tous els opprimés, mais avant tout pour les "sensitifs" dont la Société méconnaît les besoins et les capacités et qui, dans des conditions meilleurs, seraient si précieux au progrès collectif. Ceux qui ont vécu dans l'atmosphère de Tlemcen en ont gardé un intarissable souvenir. le Maître aimait contribuer aux travaux de réparation de sa demeure, comme maçon, peintre ou serrurier, et à la culture des arbres fruitiers et des rosiers de son jardin qu'il greffait savamment.

Le Maître, qui recherchait les sensitifs, considérait qu'ils étaient nombreux parmi les artistes et se plaisait en leur compagnie. Il pratiquait lui-même le chant et d'autres arts.

Une correspondance en toutes les langues avec les étudiants cosmiques, la réception d'hôtes intellectuels, quelques lointains voyages et quelques séjours à Paris et ailleurs compétaient par l'activité la vie contemplative de Tlemcen. Le premier directeur de la Revue Cosmique, Charles Barlet, le Général Bajolle, Paul Richard, et beaucoup d'autres, furent comem mes parents, les hôtes de Tlemcen . Ils y furent baignés d'une atmosphère spirituelle incomparable et furent témoins de faits extraordinaires. Madame Myra Alfassa-Morisset, qui devait devenir aux Indes la Révérende Mère d'une fraternité mystique à Pondichéry, participa aux débuts du Mouvement Cosmique et séjourna à Tlemcen. Il n'est pas peu significatif de retrouver sur des livres de son collaborateur Aurobindo le signe des publications cosmiques comme d'ailleurs de nombreuses idées cosmiques dans les livres de la Révérende Mère.

Quand Mme Théon reçut la première lettre de L. M. Thémanlys, accompagnant une souscription banale en faveur des publications cosmiques, elle avertit le Maître que ce souscripteur deviendrait le chef du Mouvement à Paris.

Avant de connaître les ouvrages cosmiques, Thémanlys avait décrit dans Les Ames Vivantes, une petite communauté d'artistes adeptes de la Doctrine de l'Unité. Barlet découvrit tant d'idées cosmiques dans ce roman, qu'il prit l'auteur pour un fervent de la Philosophie Cosmique. Dorénavant d'ailleurs, L. M. Thémanlys devait lui consacrer l'art de sa plume et de sa parole.

Environ trois fois par semaine pendant de nombreuses années, mon père fit chez lui, à Passy, des causeries improvisées sur la Philosophie Cosmique devant des auditoires d'intellectuels, d'artistes et de gens du monde.

Les questions des nouveaux venus suscitaient des réponses éloquentes et variées qui s'adressaient profondément à l'âme de chacun. L. M. Thémanlys se donnait autant de mal pour convaincre un adolescent de quinze ans ou une jeune fille sans instruction qu'un professeur à la Sorbonne ou un ancien ministre.

Parmi ceux qui portèrent une certaine attention à l'œuvre cosmique, on peut citer le Président Mazaryk, les poètes Hélène Vacaresco et Anna de Noailles, le Dr Serge Voronoff, Edouard Schuré, le Dr Schrenck-Notzink, la Princesse de Rohan à Vienne, l'helléniste Mario Meunier, le Général Pechkoff, la Marquise Ali Maccarani de Florence, le peintre Guillaumin, Georgette Leblanc etc..

Parmi les plus actifs travailleurs du Mouvement Cosmique, il faut ajouter aux visiteurs de Tlemcen que nous avons cités, René Caillié, l'écrivain Marc Séménoff, le compositeur Jacques Janin, les peintres Jacques Blot, Louis Bouchet, l'architecte Louis Berthaud, Maurice Ben Haroche, Mesdames Berkefeld de San Francisco, Berr de Turique, Boas de Jouvenel, la Baronne d'Eichthal, les Comtesses Batowska, Mesdames Perrault-Duban, Marie Doyen, Chapelot.

Un jour, ma mère montra l'enveloppe fermée d'une lettre qu'elle venait de recevoir, à Mme Théon. Celle-ci lui dit immédiatement : "Comme l'amie qui a écrit cette lettre est charmante !" Elle se mit à décrire les traits de son visage et les qualités de son caractère, sans même avoir ouvert la lettre. Ma mère s'écria : "Mais vous ne connaissez même pas sa photographie !"
"Quand vous me parlez d'elle" répliqua-t-elle, "je la vois comme si elle était présente".

Une autre fois, sur une plage de Normandie, ma mère et Mme Théon se promenant, virent arriver de loin du pêcheuse avec un panier de poisson. Mme Théon dit à ma mère : "Cette pauvre femme est bien sensitive, elle a beaucoup de lumière autour d'elle, dans son aura". La pêcheuse s'approchant, Mme Théon lui demanda le prix des poissons. "Pour vous, répondit-elle, je donnerai tout mon panier. Vous êtes comme un ange sur la terre ; je n'accepterai jamais un sou de vous". Et la femme s'enfuit en abandonnant sa pêche.


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